L'Art de commencer un roman

Comment bien débuter un roman ? Quelles sont les clés pour un premier chapitre réussi ?

Selon les grands anciens du music-hall, deux choses sont indispensables dans un spectacle : réussir son entrée et réussir sa sortie. Le reste, affirmaient-t-il, tout ce qui se passe entre les deux, on s’en fiche. Aujourd’hui, nous allons voir de quelle manière commencer un roman pour donner au lecteur ou à la lectrice envie de poursuivre sa lecture.

Un ami éditeur à la dent encore plus dure que moi s’est amusé à compiler touts les débuts de manuscrits ratés qu’il reçoit. Ces premières phrases qui ne donnent pas envie de lire la deuxième se classent en trois catégories : celles qui donnent l’heure ("Le réveil sonna à sept heures et elle ouvrit les yeux…"), celles qui indiquent la météo ("Il pleuvait sur Brive-la-Gaillarde…"), celle où le narrateur se regarde dans le miroir ("Mes longs cheveux bruns étaient ébouriffés ce matin et j’avais l’air d’avoir dix ans de plus que mes trente-trois ans et demi…").

Comment éviter ça ? Quels sont les secrets pour commencer un roman de façon excitante, qui transpire, swingue, donne envie de lire la suite ? Ou mieux : qui ne laisse pas le choix au lecteur ou à la lectrice et l’accroche aussi sûrement qu’un pochon de crack ?

Commencer un roman par le début, par le milieu ou par la fin ?

L’astuce polareuse consistant à attaquer in medias res se transpose avec aisance dans l’érotisme. Ce terme latin qui signifie "au milieu de choses" désigne un récit qui débute en pleine action. Exemple : "J’étais occupé à lécher Samia, dont je découvrais enfin la magnifique chatte de vraie blonde, quand j’ai senti une langue inconnue me titiller l’anus." La scène se poursuit jusqu’à sa conclusion, livrant quelques indices sur le contexte, avant de repartir en arrière au chapitre suivant pour nous fournir des éléments d’explication.

Autre technique possible, plutôt issue cette fois du fantastique, commencer un roman par une phrase choc, mystérieuse et abrupte, qui donne l’impression de débuter l’histoire par la fin pour ensuite raconter les événements qui y conduisent : "Il lui a fallu six mois pour s’arracher à l’emprise vénéneuse de Melchior ; tandis qu’elle marchait dans la rue, encore fébrile et tremblante – secouée aussi de vagues de désir qu’elle s’interdisait d’éprouver –, elle imaginait avec délectation la tête qu’il ferait en découvrant son appartement dévasté, et celle qu’il ferait en comprenant que Paul, lui aussi, avait fini par voir clair dans son petit jeu."

Bien sûr, commencer simplement un roman par le début et mettre en place les protagonistes, le décor et le contexte fonctionne parfaitement… à condition de respecter les quelques règles qui vont suivre !

Du cul dès le début ?

Évitez de démarrer par un verbe faible : la première phrase donne la couleur générale de votre prose, et un livre commençant par "Je suis", "Il a" ou "Elle fait" n’encourage guère à poursuivre la lecture.

Bannissez les longues descriptions ou les interminables explications psychologiques ou contextuelles. Si ces informations sont nécessaires à votre récit, il sera toujours temps de les distiller plus tard, au fil de la narration, à petites doses.

Le plus simple reste dans doute de commencer un roman par une action simple qui montre votre personnage principal dans son quotidien, dans sa vie normale, avant l’irruption de l’événement qui lancera l’histoire proprement dite.

Autre entrée en matière aussi efficace que facile à mettre en œuvre : la conversation. Ouvrir sur un dialogue donne la possibilité de jouer sur différents registres de rythmes et de langues, donc de dynamiser le récit. Ça permet aussi de présenter facilement les personnages, d’exprimer leur psychologie et leur voix avec une grande économie de moyens – et de le faire avec plusieurs personnages d’un coup, ce qui peut faciliter les choses si votre roman est très peuplé.

Du rythme, de la tension, du swag !

Faut-il nécessairement commencer un roman érotique par une scène de cul ? S’il flirte avec les limites du genre ou nécessite une longue exposition avant d’aborder le vif du sujet, c’est une bonne idée de rassurer les lecteurs en leur confirmant vite qu’ils auront leur ration de scènes explicites.

En résumé : quel que soit le style de début que vous envisagez, il faut du dynamisme, du rythme, du swag ! Commencer un roman de cul sans créer le désir c’est comment se lancer dans un strip-tease en charentaises.

Et, par pitié : vous n’êtes ni l’horloge parlante, ni le bulletin météo ni un Photomaton. Oubliez ça pour toujours.