Obsessions - Entretien avec Claire von Corda, autrice de romans érotiques

Christophe Siébert interviewe Claire von Corda pour la sortie de son nouveau roman érotique "Obsessions".

Claire Von Corda est une grande écrivaine de romans érotiques. La preuve, même au Masque et la Plume ils ont fini par s’en rendre compte. C’est à écouter en cliquant ici (à partir de 41’ 35’’) . Au passage, merci à Laurent Chalumeau pour "branlette triste publishing". Nos lecteurs et nos lectrices apprécieront, de la part d’un type qui pige à l’émission la plus déprimante et autocentrée de la radio française, cet authentique compliment. Si j’étais le psychanalyste de Laurent Chalumeau je gagnerais plus d’argent qu’en étant l’éditeur de Claire Von Corda, ainsi va la vie.

Claire Von Corda, la plupart de nos lecteurs vous connaissent : pour les autres pourriez-vous résumer votre parcours ?

J’ai commencé par écrire des textes brefs. Sur l’ennui et le vide. Ensuite je suis passée à la taille supérieure, genre nouvelle. Sur le mal être et la solitude. Et puis un jour je me suis essayée au style "chaleur". Écrire un fantasme, l’envie. Je me souviens très bien du premier texte et de qui ça parlait. L’idée. Et si je m’envoyais en l’air avec lui. Je l’ai proposé à une revue érotique. La revue a aimé. J’ai donc continué. J’ai quand même conservé mon mal à la vie pour d’autres textes.

J’ai publié mes recueils de poésie et mes dessins en microédition chez Ni Fait Ni à Faire, un recueil de nouvelles sombres chez Rivière Blanche et bien sûr, à La Musardine, mon roman érotique Insatiable et des participations à deux anthologies, Immorales et les Nouveaux contes érotiques de Noël, dirigées par Octavie Delvaux.

Des corps qualifiés de "sales" sur les sites de rencontres

De quoi parle Obsessions  ?

Obsessions parle de frontières, du point de bascule. De relativité aussi.

Frontière dans le sens où une signification circonscrit. Et trace un cadre par sa définition, qui protège mais enferme, détermine une place face au reste du monde mais emprisonne. Condamne. C’est le débordement de ce cadre qui m’intéresse. D’où le point de bascule. Qu’est-ce qui fait que là, maintenant, le mot, la désignation ne correspond plus ?

Et la relativité. Dans le sens où une signification peut varier selon le contexte. Exemple con : être qualifié d’excentrique au sein d’un groupe de retraités est plus facile que dans un groupe de punk. 

Et tout ça, donc, dans le cadre d’un roman érotique. Ça parle de bites qui dépassent des frontières, de chattes qui s’ouvrent sur de nouveaux horizons et d’anus, surtout d’anus qui découvrent le monde.

Une bonne scène érotique ne se soucie pas de bien faire

Quelles sont vos obsessions, en tant qu’autrice de romans érotiques ?

J’aime les gros culs pour les femmes, les fesses larges et molles et les torses blancs pour les hommes. Je déteste les corps musclés. Et épilés. Elle est peut-être là, mon obsession : mettre en lumière des corps qui pourraient être qualifiés de « sales » sur les sites de rencontre. Madame n’est pas épilée, Monsieur ne passe pas deux heures par jour à la salle. Et ils ne sortent pas de la douche avant de baiser.

Quels conseils donneriez-vous à celles et ceux qui veulent écrire un roman érotique ?

Une bonne scène érotique ne se soucie pas de bien faire. Dans le sens où elle expose des fantasmes réels. Il ne faut pas mentir, sinon le récit devient fade. Pour moi un truc réussi, c’est lorsque je ne doute pas que l’auteur a la gaule quand il écrit.

Il faut trouver une gradation, faire monter l’idée, qu’elle prenne petit à petit toute la place dans la pièce. Et observer, beaucoup observer. Ce que ça fait dans sa tête, dans quel endroit du corps. Et raconter ça.

Ne pas se laisser endormir par la mollesse

Quel genre d’autrice de roman érotique êtes-vous ? Laissez nos lecteurs jeter un œil dans votre atelier !

J’écris souvent dans la cuisine, le matin ou la journée. Parfois au travail si le truc est lancé. Le soir ça me saoule.

Je ne brouillonne pas. Je me lance et j’écris. Je développe au fur et à mesure, sans forcément avancer dans la narration mais en laissant l’idée s’étendre. Je reviens ensuite parfois, pour apporter les détails, pour l’ambiance justement. J’attache beaucoup d’importance à l’ambiance, au rythme aussi. Il m’arrive d’écrire des scènes avec un morceau de musique en boucle. Et d’écouter vraiment la musique. De l’observer et de simplement la transcrire dans ma scène. 

Je relis à voix haute. Évidemment.

Les rituels d’écriture ne me sont pas nécessaires. On croit qu’on a besoin de ceci, de cela, de commencer à telle heure, mais lorsqu’on a un travail alimentaire, il ne reste que l’essence, l’âme. On écrit quand on peut. Et pas forcément quand on veut. Et peut-être qu’on ne sera même pas chez soi, peut-être qu’on ne pourra pas forcément fumer ni boire de café. Le monde du travail m’a appris ça, qu’on peut écrire sur son portable, pendant sa pause ou dans le local où on range les trucs. Faut juste ne pas se laisser faire par l’extérieur ni se laisser endormir par la mollesse.