On ne présente plus Gil Debrisac, auteur de nombreux romans érotiques à succès (Club privé, Jennifer femme-chienne, La Louve et l’agneau, La Bourgeoise…). La sortie de Pussy , son dernier ouvrage, est l’occasion de faire le point sur une carrière longue de trente ans, entièrement consacrée à l’exploration de toutes les nuances du vice !
Bonjour Gil Debrisac. Pussy, si je compte bien, est votre vingt et unième roman érotique. Quel parcours ! Pouvez-vous nous raconter vos débuts ?
Après avoir lu des récits érotiques dans Union et les avoir trouvés plutôt mal rédigés, j’ai écrit une nouvelle. Quant à la faire publier, trouver un éditeur, ce fut toute une histoire. Je me suis rendu dans une librairie spécialisée. Après quelques mots d’explication, le libraire m’a donné le nom d’une maison d’édition que j’ai noté à la va-vite sur un bout de papier. Le lendemain, la fièvre aux joues, j’ai glissé mon manuscrit dans une grande enveloppe, accompagné d’un petit mot pour l’éditeur et l’ai postée.
"Pouvez-vous m'écrire 200 pages pour dans trois mois ?"
Mais mon envoi est resté sans réponse pendant un an et demi !
Un soir, alors que je m’étais fait une raison, le téléphone sonne. C’est comme ça que j’apprends que mon manuscrit a mis tout ce temps à arriver à bon port… car j’avais inscrit sur l’enveloppe "Medium Hill" au lieu de "Media 1000" !
Mais mon texte a quand même fini par parvenir entre les mains d’Esparbec, le pornographe le plus prolifique de cette maison, qui dirigeait aussi la collection Les Aphrodisiaques. Il trouvait mon histoire intéressante, mais trop courte. Nous étions fin octobre 1994. J’ai failli avaler de travers quand il m’a dit : "Votre manuscrit ne fait que trente-cinq pages, pouvez-vous m’en écrire deux cents pour janvier prochain, dans trois mois ?"
"J'explore des sexualités considérées comme marginales, que la littérature générale ignore"
Sans trop savoir dans quoi je m’embarquais, j’ai dit oui et me suis mis au boulot. C’est ainsi qu’en juin de l’année suivante est sorti mon premier roman érotique, L’Esclave blanche !
Comme L’Esclave blanche a eu un peu de succès, j’ai continué. Ma petite carrière de pornographe était lancée. La suite, vous la connaissez : dix autres romans aux Aphrodisiaques, quatre dans la collection « Confessions érotiques », autant aux « Interdits » et deux autres dans la collection « Lectures amoureuses ».
Faites-vous une différence entre un roman érotique et un roman de littérature générale ?
Il ya toujours eu des scènes érotiques dans les romans, de tous temps et quel que soit le genre ou le style. Mais il faut appeler un chat un chat : dans mes ouvrages, j’explore des sexualités considérées comme marginales, telles que la domination, le soumission, le sado-masochisme ou le candaulisme. La littérature générale ignore ces thématiques-là, et en tout cas ne traite sûrement pas avec la même profondeur et ma même acuité que peut le faire un roman érotique.
De quoi parle Pussy, votre dernier roman érotique ?
Pussy raconte l’histoire de Catherine, une très belle pharmacienne. Sa rencontre amoureuse et sexuelle avec Jean transforme sa vie en passion dévorante. Avec lui, elle concrétise un fantasme profondément enfoui au fond d’elle-même : devenir une poupée de plaisir. Son parcours est une incroyable succession de scènes sexuelles plus torrides les unes que les autres.
"Éviter les happy ends"
Parlez-nous de l’aspect technique de votre travail, laissez nos lecteurs jeter un œil dans votre atelier !
Pour moi, un auteur de roman érotique doit faire preuve de méticulosité, de précision dans le choix des mots employés. Avant de me lancer dans l’écriture, je commence par réfléchir longuement à mes personnages, à la trame de l’histoire, et je ne commence à rédiger que quand j’en connais chaque détail, y compris la fin.
Esparbec m’a toujours conseillé d’éviter les happy ends, conseil que j’ai suivi scrupuleusement.
Enfin, l’atmosphère dégagée par une scène érotique a plus d’importance que le rythme. Elle doit être très excitante pour la lectrice comme pour le lecteur. Le rythme vient tout seul si la scène est bien décrite.
Bien entendu, mes étagères sont remplies de classiques de la littérature érotique : Sade, Miller, Restif de la Bretonne, Régine Deforges, Pauline Réage...