Interview d'Ernest Thomas, auteur du roman érotique Soeur interdite

Vous saurez tout, tout, tout sur Ernest Thomas, auteur du roman érotique de cette fin d'année !

Sœur interdite appartient à la tradition classique du roman érotique : un jeune homme empoté et timide se fait déniaiser par une perverse qui le pousse dans ses retranchements. L’originalité de ce roman, c’est la capacité d’Ernest Thomas à le situer dans un cadre moderne et contemporain, et surtout à nous proposer des personnages vivants, émouvants et attachants en dépit de leur ambiguïté.

Bonjour Ernest Thomas. Sœur interdite est votre premier roman érotique. Parlez-nous de votre parcours.

J’ai exercé toutes sortes de métiers bizarres, notamment modérateur de commentaires pour des médias en ligne. J’ai écrit de la poésie et des nouvelles, publiées dans des fanzines. Sœur interdite est mon premier roman érotique et mon premier roman tout court. Avant ça, mon lien avec le monde du livre a été la traduction du russe de Feminicid, une enquête journalistique parue au Diable vauvert.

"Un triangle amoureux de plus en plus pervers"

De quoi parle Sœur interdite

Un jeune homme ne parvient pas donner du plaisir à son amoureuse ; la sœur de cette dernière, au courant de la situation, entreprend d’éduquer ou coacher ce jeune homme. Une chose en entraînant une autre, ça va déraper. À partir de là, les trois protagonistes seront pris dans un triangle amoureux de plus en plus tordu et pervers…

Dans Sœur interdite, le personnage principal est souvent passif et comme livré en pâture aux appétits pervers de la sœur de sa petite amie. Il me semble que cette passivité joue un rôle important dans l’érotisme de votre roman. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Je crois que j’avais envie de mettre en scène un personnage féminin fort, qui va au bout de ses désirs et n’hésite pas à franchir les limites de la morale ; qui assume ses choix. Et il me paraissait intéressant d’utiliser par contraste un personnage masculin qui se laisse guider par les événements plutôt que d’en être le moteur. En plus, comme l’histoire est racontée à la première personne, de son point de vue à lui, il m’a semblé que l’identification serait plus facile s’il traversait les situations avec une certaine passivité, comme vous dites, s’il se contentait d’être, d’une certaine façon, la "caméra" plutôt que le héros. 

"Coller le plus possible aux fantasmes des personnages"

Selon vous, qu’est-ce qui caractérise une bonne scène érotique ? 

Je pense que les deux ressorts les plus puissants d’un roman érotique sont le récit initiatique et le franchissement des interdits. Et donc une bonne scène érotique doit évidemment s’intégrer au récit, nous apprendre si possible quelque chose que nous ignorions sur les personnages, mais surtout proposer une progression par rapport à ces deux notions : l’initiation et les interdits. Je crois qu’un bon roman érotique doit en permanence jouer sur le conflit entre la raison des personnages (leur éducation, leur morale, leur sociologie) et leur désir. La clef d’une bonne scène érotique se situe dans la tension, dans la contradiction qui naît d’un désir ou d’un plaisir contraire à sa propre éthique.

Je pense aussi qu’il faut le plus possible coller aux fantasmes de ses personnages, sans jamais chercher à transposer les siens, ni à exprimer ceux que l’on attribue à ses lectrices et à ses lecteurs – la fausse piste par excellence !

Enfin, il faut tout faire pour qu’on y croie. L’immersion est la première qualité d’un roman érotique. Et sans doute d’un roman tout court, d’ailleurs.

"L'incroyable bordel de notre existence"

Quel genre d’écrivain êtes-vous ? Vous brouillonnez beaucoup ? Parlez-nous de l’aspect technique de votre travail, laissez nos lecteurs jeter un œil dans votre atelier ! 

Avant de commencer, je m’efforce d’avoir une idée vague des personnages (de leur voix, de leur personnalité, esquissée à gros traits), et une situation de départ qui me semble assez riche et prometteuse pour tenir tout un roman. Ensuite, je me lance. J’écris un premier jet très rapidement, pour ne pas perdre le fil et rester le plus instinctif possible. Enfin, je relis aussi longtemps et aussi souvent que nécessaire, pour réduire, affiner, préciser, donner de la profondeur, de la richesse, de la netteté à mon récit. D’une façon générale, je privilégie le rythme, l’atmosphère et les émotions. Et je m’efforce que mes intrigues ne soient pas trop mécaniques. J’ai envie que mes romans érotiques – car je compte bien en écrire d’autres ! – ressemblent le plus possible à l’incroyable bordel qu’est notre existence, et le moins possible à un épisode de série télé, scénarisé, formaté et où pas un poil ne dépasse.